samedi 13 février 2021

Congrès National Aéronautique à Toussus le Noble - 1946

Congrès National Aéronautique à Toussus le Noble - 1946
photo Gallica-bnf
La proximité de la capitale et la renommée passée de l'aérodrome de Toussus-le-Noble en font le site idéal pour le développement de l'aviation de tourisme et d'affaires. 
Orly est alors l'aérodrome des longs courriers et Le Bourget celui des liaisons européennes, que l'on veut progressivement vouer au fret aérien. 

Les kermesses aériennes et les salons professionnels qui sont organisés à Toussus, connaissent un très grand succès jusqu'au début des années soixante-dix.

Le nouvel aérodrome de Toussus ne ressemble ni à l'ancien aérodrome Farman, ni à Toussus-Paris. 

Cette renaissance peut être datée du 24 octobre 1946, jour où le commandant Henri Tessier, succède au commandant militaire Tromeur et ouvre le terrain à la circulation aérienne publique, ouverture confirmée par l'arrêté ministériel du 6 février 1947 alors que le Normandie-Niemen est encore là pour quelques mois.

Le commandant Tessier cherche à faire de Toussus-le-Noble un aérodrome agréable d'autant que l'idée d'un centre d'activités de loisirs demeure dans les esprits. Les abords sont traités en pelouses et massifs de fleurs, régulièrement entretenus, effaçant progressivement la trace de l'histoire. 
Les sociétés et les aéroclubs qui s'installent sur le terrain participent à l'aménagement de la zone Sud en rénovant les hangars de Toussus-Paris et ceux construits hâtivement pour le Normandie-Niemen, en établissant de nouveaux hangars dont des abris allemands et par des constructions neuves, comme l'élégant bâtiment d'AirTourist.

Pour vanter les mérites de l'aérodrome de Toussus-le-Noble, Henri Tessier retrouve les arguments des frères Farman : l'attrait d'une région à vingt minutes du centre de Paris, le château de Versailles et la vallée de Chevreuse, pour d'agréables promenades aériennes, la possibilité de déjeuner dans un cadre privilégié et original.

22 Avril 1946, première manifestation aérienne de l’Après-Guerre

Le premier Salon aéronautique de France après guerre intervient dans le cadre du deuxième Congrès national de l'aviation qui se tient à la Sorbonne du 15 au 25 avril 1946. Deux mille sept cents congressistes (savants, ingénieurs, industriels, techniciens, ouvriers, civils et militaires) se penchent sur l'avenir de l'aviation française où tout est à reconstruire.

Le lundi de Pâques, 22 avril 1946, le congrès se rend à Toussus-le-Noble pour une présentation d'avions de tourisme et de planeurs.
Tôt dans la matinée, les badauds arrivent et, depuis les barrières de sécurité engagent la conversation avec les pilotes et les constructeurs présents auprès des appareils quand un camion décharge un avion en pièces détachées : comme l'avait fait REP autrefois, en dix minutes, un avion, le SECAT RG60 est monté et mis en place sur la pelouse.

L'après-midi, le public s'enrichit de visages connus : Henri Farman, Maryse Bastié, Charles Dollfus, Robert Morane, plusieurs officiers du Normandie-Niemen dont Robert Marchi,  et même quelques officiers russes, anglais et américains.

Le Ministre Charles Tillon et son fils
 photo Gallica- bnf
Vers 15 heures, Charles Tillon, ministre de l'Armement, arrive avec son jeune fils et se montre soucieux du prix des avions qu'on lui présente : l'État est à la recherche de l'avion d'aéroclub économique.

Une vingtaine d'appareils est présentée en vol: les pilotes les plus avertis rompent la monotonie du spectacle par des démonstrations d'acrobaties ; des planeurs, Guerchais-Roche, Castel-Mauboussin, C800 et PM200, remorqués par des Fieseler, se livrent, eux aussi, à de remarquables manoeuvres de voltige ; un hydravion, le SCAN20 fait plusieurs passages dans le ciel de Toussus.

Ce premier Salon aéronautique de France est regardé comme un succès qui a permis d'évaluer production et les développements nécessaires.

Pour Toussus-le-Noble c'est le début d’une ère prospère : le 20 juin suivant s'y tient en effet, la première fête aérienne de l'après-guerre avec une participation active du Normandie-Niemen, puis les événements aériens s'enchaînent.. .

L’engouement pour l'aviation populaire est resté intact. Les pouvoirs officiels, soucieux de relancer cette aviation, organisent un concours pour un appareil léger, fiable et d'un prix abordable, stimulant la créativité de nombreux ingénieurs.

Comme avant-guerre, par des subventions pour l'achat d'appareils et des bourses de formation, par la détaxe du carburant, par l'affectation de moniteurs d'Etat, ils encouragent le fonctionnement d'aéroclubs qui se multiplient dans tout le pays et de fréquentes fêtes aériennes tentent d'amener un public toujours plus large à la pratique de l'aviation.

Une reprise rapide de l’activité des aéroclubs

Selon le directeur de la formation aéronautique et des sports aériens de 1957, on comptait, en 1938, pour toute la France, 640 avions dans les aéroclubs.

En 1946, date de reprise de l'activité de l'aérodrome de Toussus-le-Noble, il n'y en a plus que 12, mais déjà 319 en 1950.

On retrouve le niveau d'avant-guerre en 1954 avec 641 appareils qui vont, en trois ans, plus que doubler pour atteindre 1 427 avions d'aéroclubs en 1957.

Le premier aéroclub à revenir sur le terrain de Toussus-le-Noble est le club Louis Moulliard. Logé d'abord dans le hangar face aux ruines de l'Aviatic Hôtel, il s'installe ensuite dans un des petits hangars demi-tonneau de la zone Sud.  Le club disparaît en 1950, remplacé par l'aéroclub du Cinéma de Georges Peclet.

Parmi les aéroclubs qui s'installent en 1947, deux sont toujours sur le terrain : l'aéroclub du canton de Sceaux créé en 1937, aujourd'hui Air Europ'Club de Toussus-le-Noble et le Groupe Aérien du Touring Club de France créé en 1930, basé auparavant à Buc.  En 1949, le Groupe Aérien du Touring Club de France ouvre un lieu de restauration et le 20 juillet 1949, une déclaration d'intention d'exploiter un débit de boissons en qualité de propriétaire, successeur de Sorin et Cie pour la licence est fait par par le président du TCF, Henri Gasquet.

Le club Air France arrive en 1952, c'est le troisième plus ancien aéroclub de  Toussus-le-Noble.

À l'opposé, des clubs de cette époque partiront sur d'autres aérodromes comme le club des Cheminots qui va à Guyancourt ou le club Hispano-Suiza, parti à Pontoise.

À Toussus-le-Noble, « il se passait souvent quelque chose, ... c'était un festival de voltige - époque de Max Delhomme de Jean Falloux - l'arrivée d'une course, la venue d'une vedette.. ) témoignent les voisins de l'aérodrome.

Le  trafic aérien est important - on enregistre 1 180 mouvements dans la journée du 11 juillet 1949. Ce trafic s'écoule par la seule piste en grilles qui ne sera bitumée, à même les grilles, que vers 1960 ; les tours de piste y ont la part belle.

Une bande gazonnée de six cents mètres sur cent est alors aménagée en 1950, au sud de la piste en grilles, avec sa propre voie d'accès et permet d'absorber le trafic des avions-école qui peuvent atterrir, deux par deux en léger décalé, dégageant rapidement la piste.

L'aviation, après guerre, attire toujours autant la population. Le dimanche, nombreux sont les clubs qui organisent des baptêmes de l'air avec un franc succès, au point que Jacques Devaux, passé au civil comme chef de la circulation aérienne de Toussus-le-Noble et titulaire d'un brevet de pilote, prête souvent main forte aux moniteurs qui ne peuvent répondre à la demande.

L'aérodrome de Toussus-le-Noble est fréquemment désigné comme lieu de départ ou d'arrivée de compétitions aériennes comme les Tours de France ou les Rallyes internationaux.

Le Tour de France des jeunes pilotes, né en 1953, est organisé par - la Fédération Française de Vol à Moteur, présidée par Jean-Michel Vernes. L'épreuve permet aux jeunes pilotes d'appliquer leurs connaissances et de mesurer leurs capacités sur un parcours en plusieurs étapes. La compétition connaît un tel succès que le nombre de participants doit être limité à une cinquantaine dans les années soixante et une sélection préalable s'effectue sur des circuits régionaux.

Pour la région parisienne, c'est Paul Ducellier, président de l'Union régionale et par ailleurs directeur de la station-service Farman de Toussus le-Noble, qui les organise avec Gaston Bondin (1), commissaire général, instructeur à Toussus.
L'esprit de Toussus-Paris n'est pas absent. Il se retrouve chez les constructeurs amateurs qui continuent à venir essayer leurs appareils à Toussus.  


1 - Gaston Bondin, père de Michèle Bondin-Seignette, femme pilote, membre d'Aeriastory

Extraits « D’azur et d’Or » - Centenaire de l’aéroport de Toussus (2007)