mercredi 27 septembre 2017

Rayak et son positionnement historique

Rayak et la genèse du Normandie, nous démontre la complexité historique du lieu tout au long du siècle dernier pour nous faire remonter aux accords de Sykes-Picot et comprendre les nombreux protagonistes en présence

Les accords secrets Sykes-Picot ont été signés le 16 mai 1916, après négociations durant la période novembre 1915 et mars 1916, entre la France et le Royaume-Uni (avec l'aval de l'Empire russe et du royaume d'Italie), prévoyant le partage du Proche-Orient à la fin de la guerre en plusieurs zones d'influence au profit de ces puissances. Ce qui revenait à dépecer l'Empire ottoman en fin de vie.
Ces accords secrets n'ont été révélés au grand public que le 23 novembre 1917 dans un article des Izvestia et de la Pravda et le 26 novembre 1917 puis repris dans un article du Manchester Guardian.

Le but était de relier Beyrouth à Damas, faisant de Beyrouth l'accès de la Syrie à la mer et contrecarrer ainsi le projet britannique de relier Damas à Jaffa.

Le Proche-Orient est alors découpé, malgré les promesses d'indépendance faites aux Arabes, en cinq zones :

1. zone bleue française, d'administration directe formée du Liban actuel et de la Cilicie ;
2. zone arabe A, d'influence française comportant le Nord de la Syrie actuelle et la province de Mossoul ;
3. zone rouge britannique, d'administration directe formée du Koweït actuel et de la Mésopotamie (actuel Irak sans la région de Mossoul) ;
4. zone arabe B, d'influence britannique, comprenant le Sud de la Syrie actuelle, la Jordanie actuelle et la future Palestine mandataire ;
5. zone brune, d'administration internationale comprenant Saint-Jean-d'Acre, Haïfa et Jérusalem. La Grande-Bretagne obtiendra le contrôle des ports d'Haifa et d'Acre.

Rayak, dans la plaine de la Bekaa, se trouve dans la zone bleue française à 62 km de Beyrouth.
De par sa position, la ville comporte de nombreux équipements publics : un aéroport militaire, une caserne, une gare de chemin de fer sur l'ancienne ligne Beyrouth-Damas construit par une société française en 1895.

La ligne d’une longueur totale 117 km, dont 92 km au Liban a été construite par la Société des Chemins de fer Ottomans économiques de Beyrouth-Damas-Hauran. Le même consortium  qui construisit le chemin de fer Damas-Hama et prolongements qui vont jusqu'à Alep où il se raccorde au chemin de fer Berlin-Bagdad construit par un groupe à dominante allemande.

Les gares et les maisons des gardes-barrières sont des copies d'ouvrages français, les rails et le matériel de voie sont belges, les locomotives à vapeur sont suisses. La voie franchit la chaîne du Mont-Liban et culmine à 1 400 mètres. Les locomotives à crémaillère sont nécessaires.

Pendant la Première Guerre mondiale, l'aéroport militaire fut construit par les troupes allemandes. En 1918, l'armée britannique bombarda la gare et la détruit.
 À l'issue de la Première Guerre mondiale, le Liban ainsi que la Syrie voisine avaient été placés sous « mandat » français par la Société des Nations (SDN).
Suite à l'invasion de la France par la Wehrmacht en 1940, les deux territoires passent sous l'autorité du régime de Vichy et accueillent des détachements de la Wehrmacht destinés à attaquer les possessions anglaises voisines.

Les Britanniques ripostent. Ils bombardent la base française et les dépôts de Rayak tenus par les troupes du Régime de Vichy.  En conséquence, dès juin-juillet 1941, une armée britannique complétée par des détachements de la France Libre occupe la Syrie et le Liban.

Le premier groupe aérien de chasse de la France libre (Groupe de chasse Alsace) y est créé le 15 septembre 1941. Sur une initiative du général VALIN, le Groupe de Chasse n°3 “Normandie” est créé à Rayak, le 1er septembre 1942.