jeudi 5 septembre 2024

L’aéro-parc d’Henri Tessier, commandant ADP de l’aéroport de Toussus

La récente réalisation du terrain de jeux d’enfants, par ADP,  face à la tour de contrôle et de la stèle d’Henri Tessier, est une belle ouverture à la convivialité entre Riverains et aéroports. 
En effet, que le public puisse voir les avions, fréquenter le terrain, se restaurer à proximité,  développe et améliore les relations de bon voisinage.

Le premier commandant de cet aéroport, Henri Tessier devrait être ravi par cette initiative.

1946, L’Etat désigne Les Aéroports de Paris comme gestionnaires de l’aérodrome de Toussus le Noble. La proximité de la capitale et la renommée passée de cet aérodrome en font le site idéal pour le développement de l'aviation de tourisme et d'affaires.

Au départ privée, la plateforme est devenue aérodrome d'Etat. Elle fut géré, comme tous les aérodromes, d’Etat de la région parisienne, par Aéroport de Paris.
La direction de Toussus-le-Noble a été confiée à Henry Tessier car Aéroport de Paris a compris l'intérêt de développer Toussus-le-Noble pour en faire un centre de l'Aviation privée.  Le Commandant Tessier fut secondé par le Commandant Bouchard. Ces hommes convenaient pour mener à bien ces objectifs et rendre l'aérodrome toujours plus accueillant à ceux qui le visitent afin de leur donner le désir d'y revenir et de participer eux-mêmes à ces activités aériennes.

Cette renaissance, datée du 24 octobre 1946 est  le jour où le commandant Henri Tessier, succède au commandant militaire Tromeur. Le terrain s’ouvre à la circulation aérienne publique, et est confirmée par l'arrêté ministériel du 6 février 1947. Le Normandie-Niemen est encore là pour quelques mois, il sera un important levier à cette renaissance. (notre prochain article)

Le commandant Tessier cherche à faire de Toussus-le-Noble un aérodrome agréable d'autant que l'idée d'un centre d'activités de loisirs qui découle de Farman et du Toussus-Paris, demeure dans les esprits. 
Les abords sont traités en pelouses et massifs de fleurs, régulièrement entretenus. 
Pour vanter les mérites de l'aérodrome de Toussus-le-Noble, Henri Tessier retrouve les arguments des frères Farman : l'attrait d'une région à vingt minutes du centre de Paris, le château de Versailles et la vallée de Chevreuse, pour d'agréables promenades aériennes et la possibilité de déjeuner dans un cadre privilégié. 
  Toussus va avoir ainsi son « aéro­parc » dont la concession a été accordée par l' Aéroport de Paris, à M. Michalet, lui-même pilote.  Cet « aéro-parc », qui se situera près de l'aérogare,  comprendra :

 1 °. Une station-service pour automobiles avec pompes à essence, lavage, graissage; atelier  de petit entretien et réparation de pneus; garage fermé pour les usagers du terrain, deux voitures 4 CV. destinées à la location sans chauffeur, une auto-école, ..­.  

  2°. Un parc de sport et de jeux avec Piste pour le vol circulaire des modèles réduits, golf miniature, volley-ball, spiro-ball, deux jeux de boules lyonnais, un parcours de « pétanque» marseillaise, un portique avec agrès, un service de location de bicyclettes d'enfants, autos mécaniques, trottinettes, un jardin d'enfants surveillé.

 3.  Un bureau de tourisme en liaison ­avec les  hôtels, les agences de théâtres, les entreprises d'excursions en autocar,  les compagnies aériennes, maritimes et ferroviaires ; ce bureau de tourisme centralisera  les demandes de baptêmes de l'air,  de vols à la demande, constituera le centre de propagande et de publicité en faveur de l'aérodrome et de ses  activités.

 4° un comptoir de vente d'articles de sport, de jeux et jouets aériens, de modèles réduits, de micro-moteurs, etc.., .

Pour Toussus-le-Noble c'est le début d’une ère prospère : le 20 juin suivant s'y tient en effet, la première fête aérienne de l'après-guerre avec une participation active du Normandie-Niemen. 
Les événements aériens s'enchaînent. L’engouement pour l'aviation populaire reste intact.  

lundi 2 septembre 2024

Les avions Fournier, l'aviation verte et les méandres de l’administration française

René Fournier au Fly In à Sorigny - 2024
Lors du Fly-in à Sorigny organisé par Antoine Ros, fondateur d'Early Aviators, pour la Commémoration des 70 ans du premier vol du CAP 30 Emeraude, Danièle Esparre a rencontré la famille PIEL. René Fournier,  créateur des « avions-planeurs » était présent, il fête ses 103 ans.

Dans de très nombreux pays, des pilotes ont le bonheur de voler aux commandes de ces avions, au faible coût d’exploitation. 

Leur pilotage et leur longévité sont unanimement appréciés. Ce créateur souhaitait se démarquer de l’escalade à la puissance et recherchait une formule d’avion fin, nécessitant peu de énergie. L'aspect visionnaire qu’il a su capter lui sera reconnu plus tard  comme le promoteur de l’aviation verte.

Avec son RF-01, après des années de mûrissement, jusqu’au RF-47, René Fournier a créé avec une nouvelle famille d’aéronefs, une nouvelle façon de voler.

Le RF-01 effectua son premier vol, le 30 mai 1960.  Des centaines d’appareils de sa marque, ou découlant d’elle, volent dans trente-cinq pays. Malheureusement, les responsables de l’Aviation civile de l’époque n’ont pas compris le véritable intérêt de sa formule. Ils lui compliquèrent même passablement la vie en lui imposant des normes inadaptées.

L’avion qu’il rêvait, il le décrit : « Mon avion, je le rêvais, ne serait pas comme les autres ; ce serait un oiseau voilier, un oiseau avec de longues ailes fines et pures ; un avion de poète, conçu pour planer, c’est à dire un « avion-planeur ».

Suit une évolution sur plusieurs modèles : RF-2, RF-3 et le RF4D un avion « qui se sent bien dans sa peau ». Quatre appareils sont construits par Alpavia. Mais déjà à l’époque, il est complexe de produire en France. Il n'y avait pas d’autre solution que de fermer l’usine et de partir Outre-Rhin. 
C’est la société Sportavia, créée à cet effet par Alphons Pützer, qui va désormais produire les avions Fournier sous licence. Le RF4 est le premier, auquel la lettre D est ajoutée, pour Deutschland. L’usine allemande produit le RF4 à une bonne cadence et en exporte dans une trentaine de pays

RF 5
Viennent les RF5 et RF5b, version biplace en tandem du RF4, ailes repliables. La conception et construction d’une dizaine d’exemplaires se font à Nitray (Indre-et-Loire). C’est une réussite  mais, pour la petite histoire, le moteur Rectimo du prototype lâche au bout de 50 heures de vols d’essais. Il faut donc trouver un autre moteur. Alphons Pützer rencontre alors Peter Limbach qui propose un 1700 cm3, dérivé aussi du VW. Classé motoplaneur en Allemagne, le RF5 se retrouve lui aussi classé dans la catégorie des « Avions fins à atterrissage plané court » en France où il n’y a toujours pas de catégorie «motoplaneur». 
Il n’est pas autorisé voltige en France. 
Bernard Chauvreau fait pourtant d’innombrables présentations de voltige, y compris au Bourget. En fait, on est en règle ou en défaut selon que l’immatriculation est allemande ou française !

Durant toute son activité, l’État n’avait toujours pas compris l’intérêt de la formule, malgré l’exemple et le succès des plagiaires un peu partout dans le monde. Faute de capitaux et d’un véritable soutien des pouvoirs publics, René Fournier n’a pas eu le succès industriel mérité.  

D’autres constructeurs, avec de vrais moyens financiers, s’y sont engouffrés en plagiant sans scrupules ce modèle d’avion aux longues ailes que l’administration européenne a baptisé 40 ans plus tard TMG (Touring motor gliders) pour les différencier des vrais planeurs motorisés.

Dans son bel ouvrage autobiographique, « Mon rêve et mes combats », René Fournier s’interroge. Pourquoi tant de contraintes et de contrôles aussi paralysants, et pourquoi ne sont-ils imposés qu’aux avions certifiés et pas aux avions en kit ou aux ULM ?  
Tout simplement parce qu’en signant une certification, l’État s’engage sur la qualité des futurs appareils produits. Pour se protéger, il impose de telles règles qu’il n’y a plus rien à faire. 
Telle est sa conclusion. 

A 70 ans, il arrête sa carrière aéronautique, mais il n’abandonne pas ses anciens clients et amis qu’il continue d’aider bénévolement, de ses conseils.

Aujourd’hui, il a 103 ans passé, il n’a qu’un seul regret : celui de ne pas être parti aux États-Unis, patrie de la libre entreprise, dès la sortie de son premier avion en 1960.

Texte inspiré de « Club Fournier International »